Basse,  Figures De La Soul,  Funk,  Jazz,  Motown,  Musique

Motown : Carole Kaye ou James Jamerson ?

Carole Kaye & Fender Precision Bass en studio
Carole Kaye & Fen­der Pre­ci­sion Bass en studio

C’est le débat qui sus­cite tou­jours les plus vives polé­miques autour des auteurs des lignes de basse élec­trique des grands stan­dards de la Motown (la fameuse écu­rie du disque de Detroit “Tam­la Motown”, fon­dée par Ber­ry Gor­dy à la fin des années 1950). Ceci a été très bien illus­tré dans le film Stan­ding in the sha­dows of Motown de Paul Just­man (2002), non sans un cer­tain par­ti­sa­nisme. Les poin­tures de la basse et de la contre­basse, par­mi les­quels Nathan Watts (Ste­vie Won­der) ou Bob Bab­bitt affirment par exemple que Carole Kaye (la pre­mière grande femme bas­siste, ani­mal de stu­dio) n’est pas – comme elle l’af­firme ici – l’au­teur de la ligne d’I was made to love her, le “hit” de Ste­vie Won­der en 1967. Dif­fi­cile de dis­tin­guer le vrai du faux dans cette situa­tion ou les backing bands, ces talen­tueux musi­ciens de l’ombre (à l’ins­tar des JB’s de James Brown ou des Funk Bro­thers pour la Motown, dont l’é­qui­valent chez Stax fut Boo­ker T & The MG’s) dont le cré­dit n’a à 99% des cas jamais été men­tion­né. Ain­si dit-on que Jamer­son et son “hook” (il jouait de façon habile avec un seul doigt qu’il nom­mait son “cro­chet”) serait le bas­siste de 30 hits Motown n°1 soit davan­tage que les Beatles !

Jamerson & "Black Beauty" Fender Precision Bass
Jamer­son & “Black Beau­ty” Fen­der Pre­ci­sion Bass

Tou­te­fois, ren­dons à cha­cun leur part de talent, qu’il s’a­gisse de Carole Kaye ou de James Jamer­son, fan­tas­tiques musi­ciens au style néan­moins très dis­tinct, la pre­mière venant de la gui­tare jazz et pas­sée à la basse pour les besoins du stu­dio (dont elle a gar­dé l’u­sage du “média­tor”, petite pièce de plas­tique qui sert à pin­cer les cordes pour obte­nir un son plus inci­sif et pré­sent), le second étant un trans­fuge de la contre­basse (qu’il joue encore aux débuts de la Motown, sur My guy, inter­pré­té par Mary Wells, par exemple) pas­sé à ce qu’on appelle alors la “Fen­der bass” avec un tou­cher très influen­cé par la “grand-mère” à cause de son jeu au doigt qui conserve un tou­cher plus velou­té (voir sa magis­trale inter­pré­ta­tion de What’s goin’ on ? de Mar­vin Gaye, en 1974). Jamer­son étant décé­dé en 1983, il n’a pu y avoir de confron­ta­tion directe avec Kaye sur la pater­ni­té des lignes de basse.
Ce qui me fait me deman­der : est-ce qu’on va bien­tôt recon­naître à chaque musi­cien des droits sur sa par­tie ins­tru­men­tale au sein d’une com­po­si­tion déjà signée par un auteur ? Doit-on consi­dé­rer cela comme une inter­pré­ta­tion (ou plu­tôt, en termes plus juri­diques “exé­cu­tion”) ou doit-on aller vers une recon­nais­sance de créa­tion entière ?

L’his­toire de Jamer­son ain­si que l’é­nigme Kaye/Jamerson sont un peu déve­lop­pées ici

Pour en savoir plus sur le film de Just­man, le site offi­ciel.

Enfin, un très bon livre de Peter Gural­nick, Sweet Soul Music, aux édi­tions Allia (sep­tembre 2003), sur la soul sudiste. D’ex­cel­lentes pages qui évo­que­ront méti­cu­leu­se­ment l’his­toire de Stax records, Muscle Shoals, Hi Records, vous racon­te­ront com­ment Solo­mon Burke ven­dait du pop­corn et des sand­wiches à ses propres musi­ciens en tournée.



Laisser un commentaire