Fania All Stars : la clique du Spanish Harlem au Yankee Stadium
Fania Records a récemment été intégré au catalogue de V2 Music qui republie avec bonheur les vinyles (de belle qualité, des galettes de 180g d’acétate, à prix raisonnable) du sensationnel label des ambassadeurs musicaux de Porto Rico à New York.
Aujourd’hui, nous accueillons sur nos platines l’excellent concert en deux volumes des “Fania All Stars” publié en 1975, Fania All Stars Live at Yankee Stadium : un concert géant, sur le mode de la “revue musicale” comme chez Stax ou Motown (un enjeu : faire découvrir en un grand concert bien huilé un maximum d’artistes interprètes du catalogue). Parmi les interprètes, on retrouve Ray Barretto, Willie Colón, Edwin Tito Asencio Rubén Blades, Larry Harlow, Johnny Pacheco, Roberto Roena, Pellín Rodríguez, Bobby Valentín, et Jorge Santana (jeune frère de Carlos Santana), Celia Cruz, Héctor Lavoe, Cheo Feliciano, Ismael Miranda, Justo Betancourt, Ismael Quintana, Pete “El Conde” Rodríguez, Bobby Cruz et Santos Colón.
Ce soir de 1973, c’est en effet une foule de 44 000 spectateurs qui franchit les portes de cette institution du baseball américain qu’est le Yankee Stadium. La majorité des arrangements de cette sauce porto-ricaine est due à Bobby Valentin et Johnny Pacheco. N’oublions pas qu’à cette époque, la salsa porto-ricaine traverse le monde et répand à tout jamais son influence par le monde, de l’Europe à l’Asie, passant par plusieurs pays du continent Africain, notamment l’Afrique subsaharienne. C’est ainsi que le Fania All Stars fait un tabac au Zaïre en 1974.
Las ! Ce concert excite tellement le public qu’il s’enflamme et s’invite à danser et chanter sur scène. Larry Harlow est paniqué lorsqu’une jeune femme s’invite à danser debout sur son piano. Des animations pyrotechniques sont prévues, les musiciens paniquent encore plus et décident de se réfugier dans les loges. Le public s’empare de micros qui leur ont coûté des milliers de dollars. Fania a des engagements et des dépôts de garantie envers les tenanciers du lieu. Le concert est interrompu. A la production de l’enregistrement, il faut compléter les quelques morceaux par des raccords avec le concert enregistré en 1974 au Roberto Clemente Coliseum à Porto Rico. Il en sera de même pour le film documentaire consacré à cette tournée. Ce concert, s’il a presque ruiné Fania Records à l’époque, l’a en tout cas durablement affaibli.
La musique rythmée du Spanish Harlem infusera dans la musique guinéenne, éthiopienne (l’éthio-jazz), togolaise et j’en passe… et inversement. La diaspora africaine, hispanique nourrit l’Afrique qui l’a elle même jadis nourrie du chant de ses esclaves. On peut même trouver des traces de cette influence chez des musiciens a priori très éloignés mais connectés à l’Afrique par le cœur et les instruments, comme dans le Moin té crois pi du réunionnais Alain Péters.